Page 50 - Mémoires et Traditions
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                   Elle fut installée par le premier architecte juif dont on trouve trace en France, Jacob Silveyra, né à Bordeaux en 1785. Dans L’Illustration, en 1846, elle est présentée comme « assez semblable à celle du rite allemand, mais beaucoup plus petite. La galerie des femmes, au lieu d’être élevée et supportée par des colonnes, se trouve de plain-pied avec celle des hommes, dont la sépare seulement un grillage de bois. Du reste, l’intérieur offre une très grande simplicité. Au lieu de stalles, comme dans le temple du rite allemand, les Israélites portugais se servent de chaises3. »
Lors de la reconstruction et de l’extension de la synagogue de la rue Notre-Dame-de- Nazareth, les Portugais, durent déménager. Après avoir ouvert un oratoire provisoire 29 rue du Sentier, ils trouvèrent un emplacement 23 rue Lamartine. Le projet, qui consistait en l’appropriation d’un local existant, est confié à l’architecte Silveyra qui réussit à achever les travaux en six semaines : la synagogue est inaugurée dès le 4 juin 1851 en grande pompe. Cette fois, le rappel de la synagogue de Bordeaux est davantage affirmé, puisqu’on y retrouve une tendance néoclassique. Elevé sur cour, le temple formait un quadrilatère bordé de pilastres doriques cannelés et de lambris de chêne, bois dans lequel était aussi construit le héchal agrémenté de dorures et surélevé de quelques marches. L’éclairage se faisait par le haut, le plafond était orné de caissons et sur les côtés s’élevaient des tribunes réservées aux femmes...
Un chroniqueur, dans un journal conservateur, critique ce « grand luxe de musique et d’ornementation : nouvel orgue, augmentation du chœur, riches tapis, candélabres rostrales (sic) d’une élégance extrême4... » En revanche, Samuel Cahen, le rédacteur en chef des Archives israélites, salue l’ordre et la piété qui caractérisent les temples séfarades : « Et maintenant que ce temple est ouvert à la prière, puisse-t-il se rapprocher de plus en plus de ses modèles : ceux de Bordeaux, de Bayonne ! On sait que dans ces temples règne ordinairement beaucoup de ferveur ; que tous s’y tiennent avec le plus grand recueillement et que l’office y est empreint de beaucoup de majesté. Il y a là des chants qui touchent profondément. Peu variés, ne changeant pas au caprice d’un ministre-officiant, ils sont connus par les assistants dont les intonations inspirent le recueillement5. »
Installation du grand rabbin Simon Lévy dans le temple de Bordeaux (1864).
3 - « Synagogues de Paris », L’Illustration, 5 décembre 1846, p. 212. 4 - Simon Bloch, L’univers israélite, juin 1853, p. 475.
5 - Samuel Cahen, « Inauguration d’un temple israélite à Paris »,
Les Archives israélites, 15 juin 1851, p. 311.
6 - Dominique Jarrassé, Existe-t-il un art juif ?, Paris, Editions Biro, 2006, p. 53-62.
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