Page 66 - Mémoires et Traditions
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                    En revanche, un grand arc cintré domine cet ensemble : au fond, poursuivant le symbolisme de la niche, le tympan ajouré est centré sur le motif des tables de la Loi qu’entourent des rayons et des nuages ; sur les tables, les dix paroles, développées sur dix plaques (Exode, 20,1 à 17) ornant l’extrados qui précède la petite voûte nervurée couvrant le héchal. De belles colonnes de marbre soutiennent les arcs. Toute cette disposition, le meuble même de l’arche sainte et le symbolisme qui s’y déploie sont directement inspirés du héchal de l’ancienne synagogue de Bordeaux. La qualité indéniable de la sculpture ornementale et symbolique trouve peut-être une explication dans le fait qu’elle fut confiée à Bloche, un sculpteur israélite ; il fut supervisé par l’architecte Leroy de Bonneville chargé de la construction, mais aussi, comme le précise la presse, du choix des ornements et des emblèmes.
Deux citations méritent encore d’être remarquées, car elles sont en français :
- L’une sur l’arc qui domine le niveau où est installé l’orgue, contre la façade, est justement le Chema : « Ecoute Israël, l’Eternel notre Dieu, l’Eternel est un » : un dialogue s’instaure donc entre les deux extrémités de la nef.
- L’autre sur l’arc au-dessus de la tribune qui surmonte le porche et donne sur la nef, l’inscription choisie est la même que dans la synagogue de la rue de la Victoire : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
La chaire d’où prèche le rabbin.
C’est ici que l’usage du français prend sens, car il s’agissait alors pour les Juifs de rappeler que ce commandement placé par Jésus au centre du christianisme était une citation du Lévitique (19,18) et non une formule propre aux Evangiles. Ainsi le temple de la rue Buffault participe-t-il à la fois de la réminiscence appuyée de la synagogue de Bordeaux, celle qu’avaient connue tous ses fondateurs, et du modèle des grandes synagogues consistoriales conçues au moment de l’apogée du franco-judaïsme ou israélitisme. Toutefois, comme Séfarades, ses fidèles atténuèrent le processus d’assimilation de la synagogue à l’église en réaffirmant leur attachement à la tradition. Avec Osiris, malgré les indéniables difficultés suscitées par les vues personnelles du mécène, la communauté séfarade avait rencontré le héraut de l’identité judéo-portugaise.
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