Page 88 - Mémoires et Traditions
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                   Osiris ne semble pas avoir possédé d’objets juifs anciens importants en dehors d’un sefer et d’un livre ; il est vrai qu’il n’avait pas d’oratoire familial... Une mention dans le testament de 1898 illustre néanmoins cette propension des fidèles du temple Buffault à transmettre les objets historiques : « Je donne et lègue à la Société Civile du temple de la rue Buffault, le Sepher (Thora) qui est actuellement dans le temple que j’ai élevé à Arcachon (Gironde). Je désire que ce Sepher porte l’inscription suivante : « Rapporté par le Général Lamoricière lors de la prise d’Abdel- Kader, offert par Osiris, et la date de la prise. Je donne encore à la Société Civile de la rue Buffault le livre or et argent que j’ai reçu des mains de mon ami Albert Millaud, du Figaro, fils de l’excellent homme Polydore Millaud vis- à-vis duquel j’ai pris l’engagement de remettre en son nom et au mien, ce livre d’or qui est placé dans l’une des vitrines de mon salon21. »
Un don en 1930 vient élargir la collection et nous donne encore une occasion d’attester l’existence d’un véritable « musée », puisqu’il s’agit d’une peinture. Une note dans un journal évoque rien moins qu’un « Musée d’Art religieux israélite », lorsqu’Edmond Ulmann, neveu du peintre Édouard Moyse (1827-1908) offre un tableau de ce maître, Le Grand Rabbin présente aux fidèles le livre de la Loi, une œuvre exposée au Salon des Artistes Français en 1896. L’article précise : « Nous avons tenu à signaler ce don précieux pour rappeler à nos lecteurs l’existence, au temple de la rue Buffault, d’une salle aménagée avec art en vue de recueillir les objets artistiques – qui s’y trouvent déjà en grand nombre – ayant trait à notre culte22. »
Édouard Moyse (1827-1908) s’est fait une véritable spécialité des scènes de rabbins et de synagogues. Lorrain, il était néanmoins tout à fait fasciné par le rite portugais, accentuant même parfois dans certaines toiles le côté orientaliste des costumes. Il se rendit d’ailleurs en Algérie en 1860 ou 1861, et en rapporta des scènes juives, comme l’atteste sa Synagogue pendant la lecture de la Loi, couronnée d’une médaille au Salon de 1861. Le tableau offert par son neveu est en parfaite cohérence avec la teneur du musée de Buffault, puisqu’il représente le rite de hagbaha, c’est-à-dire l’élévation du rouleau de la Torah devant les fidèles. Moyse s’est lui-même représenté dans ce tableau assez austère, en raison du cadrage sur le grand rabbin qui ne laisse pas apparaître le contexte architectural ou les éléments de mobilier qui auraient rendu plus pittoresque la scène, à la manière des œuvres de Brandon.
Cependant une large partie du « trésor » de Buffault venait de la famille Camondo, qui, à son arrivée à Paris, tout en possédant son oratoire familial, s’était rapprochée des Séfarades de la rue Lamartine, car il n’y avait pas encore, à cette époque, de communauté orientale ou ottomane. Buffault, comme le Louvre ou le Musée des arts décoratifs affectataire du Musée Nissim de Camondo, a donc bénéficié de la « splendeur des Camondo23» , pour reprendre le titre d’une exposition récente qui rend hommage au mécénat de cette famille.
   Clé (de l’arche sainte ?).
Don de Madame Hananel Olivetti, fin du XIXe siècle.
21 - Rien ne garantit que cette mesure ait été prise car le legs ne réapparait pas dans le testament définitif de 1906 et ce type d’objets a été distribué à la famille. 22 - « Un don au temple de la rue Buffault », L’Univers israélite, 28 novembre 1930, p. 331.
23 - La Splendeur des Camondo, catalogue de l’exposition du Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, Paris, MAHJ/Flammarion, 2009.
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